Casimir a 24 ans, normalement, les élèves pouvaient être nommés Enseigne de vaisseau au bout de 6 ans.
Il vient de débarquer de la gabarre la Durance le 1er avril 1837. C’est de Toulon qu’il écrit ; il a trois ans de grade d’élève de 1re classe et il aspire à sa nomination d’Enseigne sur laquelle il croit pouvoir compter. Il est déçu et ses lettres montrent du découragement quand il écrit à son père ; mais, quand sa mère, alarmée, lui écrit pour prendre part à sa déception et lui offre un petit secours d’argent pour le distraire un peu. Ce jeune officier de 24 ans se ressaisit et refuse même cette offre généreuse. Il obtint enfin un congé de convalescence pour prendre les eaux et alla terminer sa guérison et l’année à Saint-Pons.
Cette année-là, il restera à terre, du 1er avril 1837 au 22 février 1838, soit 19 jours comptés à la mer et 10 mois et 21 jours comptés comme à terre.
L’amiral Ministre de la marine m’ayant autorisé à remettre à la sous-direction, pour rappeler à son excellence l’intérêt tout particulier que M. le comte de Caffarelli ancien préfet Maritime, porte au jeune de Bonne (Joseph Casimir) élève de 1re classe actuellement embarqué sur la Durance ou il fait des fonctions d’officier.
Ce jeune homme a été mal noté dans le commencement de sa carrière qui par sa faute a été très retardée, il passait pour mauvaise tête et paresseux, mais depuis longtemps ses chefs ont fait l’éloge de son caractère et de son instruction.
M. de Caffarelli le recommande avec instances à l’amiral et le prie de faire passer cet élève aux choix. Je joins mes instances aux siennes, connaissant moi-même ce jeune homme très capable de faire aujourd’hui un bon Enseigne de vaisseau
Monsieur le Ministre
M. de Bonne de Lesdiguières est entré à l’école de la marine en 1829.
Il a navigué depuis comme élève de 2e classe d’abord puis comme élève de première classe. Il est apte à être nommé enseigne depuis un an. Il ose en appeler à ces chefs pour établir qu’il est digne de cet avancement. 75 de ces places vont être données ; 50 le seront à l’ancienneté 25 au choix, au titre de l’ancienneté, il ne serait que 92e. Ce serait donc au choix que sa famille et lui désireraient qu’il puisse être nommé ; et c’est pour l’obtenir qu’ils invoquent l’appui des chefs les plus illustres de la marine et les bontés comme la justice de son excellence de Ministre de ce département.
Indépendamment de son zèle pour ses devoirs et de son dévouement au Roi, ils espèrent que les services de ses ancêtres seront considérés comme pouvant être pris en considération.
En l’absence de M. de Bonne, dans la crainte que la demande de sa famille ne vous parvienne trop tard, et comme ami de cette famille, je me suis décidé à vous adresser et à vous en recommander l’objet aux bontés de votre excellence.
J’ai l’honneur d’être avec respect, Monsieur le Ministre, votre très humble et très obéissant serviteur.
G Thibault, général des armées.
Mon cher père,
J’ai reçu vos deux lettres. Je vous remercie des sommes que vous me donnez pour moi. Il n’est pas possible que je manque ma nomination cette fois-ci avec toutes les recommandations que j’aurai.
J’ai écrit à Monsieur Azaïs et ai mis dans son couvert une lettre pour l’Amiral Lecoups ; j’ai eu soin d’affranchir le tout.
Ma santé est bonne pendant le jour mais la nuit je souffre de violentes douleurs dans le bras droit. Il m’est impossible d’aller à l’hôpital. Je suis passé au conseil de santé qui m’a fait compliment sur ma bonne mine et néanmoins m’a accordé 20 jours de séjour à terre. J’espère les faire prolonger au moins jusqu’au 1er mai ; et alors je demanderai un congé, peut-être avant si on ne veut pas me laisser ici. L’escadre de l’Amiral major est sur rade, les élèves manquent ; on est très difficile pour accorder ces faveurs. Le Ministère vient de lancer une dépêche relative aux congés : il faut avoir deux ans de navigation et qu’il y ait au moins 40 officiers du grade présents au port pour demander un congé et encore on les refuse.
Je me suis mis entre les mains d’un médecin, mais je souffre beaucoup plus depuis que je suis ses ordonnances ; je me frotte matin et soir avec un liniment opiacé qui me rend le bras tout vert, c’est tout ce qu’il me fait faire ; si le temps pouvait se mettre franchement au beau je pense que cela me vaudrait beaucoup mieux.
J’avais cru que l’argent du manteau avait été envoyé, je ne m’en occupais plus, quand j’ai su que mon camarade me faisait chercher de tous côtés, il a mis les 152 frs à ma disposition. Voilà un trimestre de 1837 écoulé, je les garderai, à terre j’ai besoin de plus d’argent, mes économies filent vite, je pense que cela ne vous gênera pas.
La Durance est partie aujourd’hui, je vous prie d’adresser vos lettres poste restante.
Je viens de naviguer à bord de la Durance pendant deux mois avec un officier de Labruguière, Fabre, un fort brave garçon, il est Enseigne de vaisseau depuis un an et sort de l’école polytechnique.
Je vous prie de me rappeler au souvenir de tout le monde, embrassez pour moi toute la famille, Mathilde sera sans doute rétablie quand ma lettre vous arrivera.
Adieu, mon cher père, je vous embrasse et suis pour la vie votre tendre fils.
Mon cher père,
J’attends vainement de vos nouvelles, je pense néanmoins que votre santé est bonne. La mienne est toujours dans le même état, les temps sont affreux.
La promotion a paru aujourd’hui ! il y a 30 élèves faits au choix, quinze ou vingt ont été pris après moi sur la liste ; la promotion était signée depuis le 4 ou le 5. Voilà donc encore un espoir déçu. Je me berçais vainement depuis deux ans de l’idée de quitter enfin la position désagréable où je me trouve. Monsieur d’Aragon, de Dalmatie, de Caraman se sont moqués de moi, je ne crois qu’à la bonne foi de Monsieur Azaïs qu’on a trompé. Je l’avais pourtant prévenu dans une de mes lettres de l’époque annoncée pour la publication de la promotion ; il m’aura sans doute cru mal informé. J’ai demandé un congé, on m’a refusé de l’envoyer – si vous pouviez me faire obtenir au moins cela, ce serait quelque chose.
Je suis réduit à entrer à l’hôpital pour éviter d’embarquer. On parle d’une promotion pour le mariage de « Poulot » je n’ose pas me flatter d’en être, rien ne me réussit dans la marine.
Adieu, mon cher Papa, embrassez pour moi toute la famille Je suis avec respect votre tendre fils.
Monsieur le Ministre
J’ai l’honneur de vous signaler une erreur qui est trop préjudiciable à mes intérêts pour que je ne vous en demande la rectification.
Au mois de novembre 1833, je subis un examen à Toulon, pour passer au grade d’élève de première classe. N’ayant pas satisfait mes juges, je fus renvoyé à un nouvel examen à dix mois de là. Mes camarades, de S, qui prenaient rang après moi sur la liste de la marine de 1833 eurent le même sort et par un hasard singulier, ils sont portés avant moi sur l’état de la marine des années suivantes ; quoique que nous eussions du garder notre position respective. Cette erreur m’a fait perdre 7 rangs et je reste XVIIIe sur la liste au lieu d’être le 11e.
J’espère, Monsieur le Ministre, que vous voudrez bien faire vérifier ce fait qui est d’autant plus important pour moi que les cadres sont pleins et que je me trouve dans les plus anciens élèves.
J’ai l’honneur d’être avec le plus profond respect, Monsieur le Ministre, votre très humble et très obéissant
Casimir de Bonne
Monsieur le Ministre,
M. de Bonne, élève de 1re classe, présente dans la lettre ci-jointe, qu’il m’a prié de vous transmettre quelques observations relativement à son rang d’ancienneté sur la liste générale de la Marine. Il pense qu’une erreur commise à son préjudice lui fait occuper le XVIIIe rang tandis qu’il devrait avoir le onzième. Je vous prie de vouloir bien faire vérifier cette réclamation.
Agréez, Monsieur le Ministre, l’assurance de ma respectueuse considération.
Le Pair de France, Vice-amiral, Préfet maritime.
Monsieur le Ministre
Je suis porté de recommander à votre bienveillance, le Sieur de Bonne (Casimir) élève de marine, désigné au tableau sous le n° 72, afin qu’il soit nommé officier aux premières promotions qui auront lieu.
M. de Bonne appartient à une famille très honorable du Tarn, et lui-même est animé d’un très grand zèle pour le service de la Marine auquel il a voué son existence. Il m’a été dit aussi qu’il a déjà acquis des connaissances qui lui donnent des droits à l’avancement. Dans cette persuasion, j’ai l’honneur de vous prier de lui accorder votre intérêt, en mon particulier, je vous en serai reconnaissant.
Recevez, Monsieur le Ministre, l’assurance de ma haute considération.
M. le Duc de Dalmatie
De Bonne, élève de 1re classe recommandé par M. le Marquis de Dalmatie pour l’avancement au grade d’enseigne de vaisseau. Répondu le 3 mai 1837
Nous n’avons pas le texte de la réponse, mais nous savons aussi que Casimir ne sera promu que 12 mois plus tard.
Ma chère Maman,
J’ai reçu aujourd’hui votre lettre, rassurez-vous sur mon compte j’ai affaire à un très bon médecin, du reste j’ai cessé l’usage de l’opium, il ne me produisait plus grand effet. On m’a fait prendre des bains de vapeur ; pour cela on place sur mon lit des cerceaux qu’on recouvre de mes couvertures, au pied du lit est un tuyau qui transmet la chaleur de 4 à 5 mèches à esprit de vin. Je n’ai jamais autant sué dans les bains de vapeur Turcs ; le dernier m’a causé des maux de tête ce qui a engagé le médecin à les suspendre ; il m’a fait mettre ce matin un vésicatoire au-dessous de la jointure de l’épaule, il espère beaucoup des suées. Je porte déjà le gilet de flanelle que j’espère quitter à la belle saison, si elle ne vient jamais.
Il est presque sûr qu’il y aura une promotion au mariage du grand Poulot – je désirerais bien en être.
Je prévois la réponse de l’Amiral Rosenval à Monsieur Azaïs s’il lui demande un congé, il lui dira qu’il faut que je lui adresse une demande par la voie du Préfet et qu’il me l’accordera, mais le préfet à ordre de n’en laisser partir aucune de manière que je serai aussi avance qu’auparavant. Je compte plus sur un congé de convalescence que sur toute autre chose.
Je vous remercie des 100 francs que vous voulez bien me donner, mais dans ce moment-ci je n’en ai pas besoin.
Je désirerais bien que Louis me donnât des renseignements sur un jeune homme (Laurières) sous-lieutenant au 63e, qui est venu me trouver et lier connaissance avec moi à titre d’ancien élève de Juilly. Je ne me le rappelle pas du tout quoique je lui ai dit que je m’en souvenais très bien. Je ne sais pas qui diable cela pourrait être. Du reste il m’a paru tout ébahi un jour que je lui ai dit que j’avais quitté Juilly en 1829, Il m’a affirmé que c’était impossible, que je me trompais de date. Je le soupçonne de m’avoir pris pour Henri et de n’être entré à Juilly qu’en 1830, Qu’il me dise si je me trompe. Du reste nous vivons comme de très bons amis, les camarades de mes frères sont les miens.
Adieu, ma chère Maman, embrassez pour moi mon père et toute la famille. Que Monsieur de Villeneuve (le grand-père, ancien Capitaine de vaisseau) écrive encore si cela se peut. Il est sûr d’avoir obligation à quelqu’un de sa bonne volonté seulement.
Je vous embrasse, ma chère Maman, et suis avec respect votre tendre fils.
Monsieur le Ministre
J’ai l’honneur de vous écrire pour vous demander d’accorder un congé de quatre mois au Sieur Casimir de Bonne élève de première classe à bord de la Gabarre la Durance à Toulon, pour qu’il puisse aller, sans le moindre délai, assister à des arrangements de famille dont je connais moi-même toute l’importance et l’urgence. Depuis 1829, époque de son entrée dans la marine, ce militaire n’a pas quitté son poste, mais aujourd’hui, il y est forcé par des circonstances très impérieuses qui dérivent du décès de sa grand-mère maternelle, d’une tante et d’un oncle.
Si vous daignez lui accorder, le plus tôt possible, l’autorisation, vous obligeriez celui qui a l’honneur d’être avec un très profond respect, Monsieur le Ministre, votre très humble et très obéissant serviteur,
M.Azaïs, député de l’Hérault
Je soussigné, docteur en médecine de la faculté de Paris, chirurgien adjoint des hôpitaux de la ville de Castres, certifie que Monsieur Casimir de Bonne, élève de la marine de 1re classe, est atteint de vives douleurs rhumatismales dans les extrémités supérieures. Douleurs qui doivent l’empêcher encore de reprendre son service étant obligé de continuer son traitement pour obtenir une guérison complète vue que l’a des bains n’a produit que très peu d’amélioration.
Mahoyen
Vu pour légalisation de la signature Mahuzies, Docteur médecin apposée à Castres, ce 8 septembre 1837
Vu pour légalisation de la signature de M. Mahuzies, maire de la commune de Castres.
Castres, le 4 septembre 1837, le Sous-Préfet de Castres (Tarn) Lafoz
Monsieur le Ministre,
Pendant le mois de mai dernier, sur ma demande, vous daignâtes accorder un congé de quatre mois au Sieur Casimir de Bonne, élève de première classe à bord de la gabarre la Durance ; ce militaire qui n’avait pas quitté son port depuis 1829 époque de son entrée dans la marine, est venu dans sa famille tant pour y traiter des affaires importantes que pour rétablir sa santé gravement altérée. Le premier but a été remplis ou à peu près ; mais non le second ; des douleurs rhumatismales l’empêchent de rejoindre encore son service et l’obligent à solliciter par mon intermédiaire une prorogation de son congé. J’ai l’honneur de vous transmettre, ci-joint, Monsieur le Ministre, le certificat d’un médecin qui constate le fait dont je puis vous garantir moi-même toute la vérité ; et je vous prie d’accorder au Sieur de Bonne une prorogation de congé de deux mois et de l’autoriser à jouir des deux tiers de sa solde ou de sa solde entière depuis qu’il a quitté le service et jusqu’à ce qu’il aille le reprendre. Il a droit à cette bonté de votre part pour cinq ans et demi de navigation sans interruption et par sa bonne conduite ; j’ose espérer que vous ne la lui refuserez pas et que vous voudrez bien agréer l’assurance du profond respect avec lequel j’ai l’honneur d’être, Monsieur le Ministre, votre très humble et très obéissant serviteur.
M.Azaïs, député de l’Hérault
Monsieur le Ministre,
J’ai été envoyé aux eaux par le conseil de santé de Toulon ; à cet effet vous m’avez accordé un congé de quatre mois. Ce terme étant expiré et souffrant encore d’un rhumatisme violent au bras droit ; j’ai l’honneur de vous demander une prolongation de congé de quatre mois. J’ose espérer, Monsieur le Ministre, que vous accueillerez favorablement ma demande, si vous voulez prendre en considération le témoignage du médecin que j’ai eu l’honneur de vous soumettre ; et que j’ai toujours été à la mer depuis mon entrée au service.
Recevez, Monsieur le Ministre, l’assurance des sentiments de respects avec lesquels j’ai l’honneur d’être votre très humble et très obéissant serviteur.
Casimir de Bonne, élève de première classe.
Monsieur le Ministre
Le congé que M. de Bonne, élève de première classe, obtint en juin dernier par mon intermédiaire, est le premier dont il ait joui depuis l’époque de son entrée dans la marine ; et il était si nécessaire que vous daignâtes le lui accorder sans la demande préalable à Monsieur le préfet maritime. J’ai l’honneur de vous écrire pour vous solliciter de le lui accorder de la même manière la prolongation de son congé et de vouloir bien déroger à la prescription portée sur votre lettre du 28 septembre dernier. La santé et les affaires de M. de Bonne exigent qu’il reste encore deux mois dans sa famille. J’ose vous demander à titre de grâce au moment des nouvelles élections, les députés ont surtout besoin de voir leurs démarches couronnées de succès. Je vous serais très reconnaissant de prendre en considération fais aujourd’hui auprès de vous. Daignez agréer l’assurance ainsi que celle du très profond respect avec lequel je suis, Monsieur le Ministre, votre très humble et très obéissant serviteur.
Monsieur Azaïs, député de l’Hérault, président du tribunal civil de Saint-Pons.
Monsieur le Ministre
Monsieur de Bonne, élève de première classe vous a adressé directement une demande de prolongation de congé sur l’objet de laquelle vous m’avez consulté par dépêche du 3 octobre. J’ai l’honneur de vous faire connaître sous la date du 9 que cette demande par le motif que j’indiquais me paraissait susceptible d’être accueillie. Le même jour, Monsieur de Bonne qui avait eu de M. Azaïs la communication de la lettre que vous avez écrite à ce député, s’est empressé, afin de se conforter à la marche que cette lettre trace, de vous envoyer pour vous être transmis par mon intermédiaire, une nouvelle demande que je joins ici. Je vous renouvelle à cette occasion l’avis favorable que je vous ai déjà exprimé sur la prolongation sollicitée.
Agréez, Monsieur le Ministre, l’assurance de ma respectueuse considération,
Le Pair de France, Préfet Maritime